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A machja ( A macchia)

Le maquis corse

 

 

Et le soleil se leva derrière, dessinant toutes les saillies des crêtes en ombres noires ; puis tous les sommets s'allumèrent tandis que le reste de l'île demeurait embrumé de vapeurs.

Le capitaine, un vieux petit homme tanné, séché, raccourci, racorni, rétréci par les vents durs et salés, apparut sur le pont ; et, d'une voix enrouée par trente ans de commandement, usée par les cris poussés dans les bourrasques, il dit à Jeanne :
« La sentez-vous, cette gueuse-là ? »

Elle sentait en effet une forte et singulière odeur de plantes, d'arômes sauvages.

Le capitaine reprit :


« C'est la Corse qui fleure comme ça, madame ; c'est son odeur de jolie femme, à elle. Après vingt ans d'absence, je la reconnaîtrais à cinq milles au large.

 

J'en suis. Lui, là-bas, à Sainte-Hélène, il en parle toujours, paraît-il, de l'odeur de son pays. Il est de ma famille. »

Et le capitaine, ôtant son chapeau, salua la Corse, salua là-bas, à travers l'Océan, le grand empereur prisonnier qui était de sa famille.

Guy de Maupassant ( Une vie )

 

 

 

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